NOCES DE CENDRES
NOCES DE CENDRES
Ils avaient longtemps espéré mourir ensemble
Par une nuit blanche dans une débauche de plaisirs
Mais ils avaient survécu à toutes leurs folies.
Ils ne croyaient plus finir leur vie dans une dernière fulgurance.
Leurs étreintes étaient devenues trop brèves,
Ils s'abandonnaient trop vite craignant de ne pas atteindre
L’instant sublime où le corps n'est plus qu'un cri...
S'ils ne mouraient pas d'amour sur le chemin escarpé,
Rétréci, de plus en plus malaisé où leurs forces s'amenuisaient,
Sur ce chemin qui tomberait le premier ?
Tout au long du parcours elle avait eu la certitude sereine que ce serait-elle.
Il aimait tellement la vie, c'était un roc solide comme du granit.
Elle ne savait plus quand le doute s'était insinué en elle.
Et si c'était elle qui devait poursuivre seule le parcours,
Seule, de son pas menu de femme usée.
Elle ne se déroberait pas, ferait son devoir,
L’incinérerait puisque c'était leur mutuel désir,
Garderait ses cendres, ferait son testament
Pour laisser quelques indications à ceux qui leur survivraient.
L’incinérer à son tour, mêler leurs cendres
Les jeter un jour de vent d'ouest des coteaux de Bernouilles
Afin de fertiliser la plaine nourricière où ils avaient grandi.
Mais la plaine est inculte, bâtie, bétonnée.
Peut-être dans la mer, à Sainte Maxime où ils avaient tant nagé,
Dans le golfe de Propriano où ils s’étaient tant aimés.
Mais Claude n'aime pas la mer et il se fout de ce qu'on fera de son corps
Le seul endroit où il aspire à demeurer longtemps,
C’est dans le cœur de ceux qui l’aiment...
Tout compte fait moi aussi.
Qu’importe ce que vous ferez de nos cendres mêlées
Pourvu que pour l'éternité nous soyons ensemble…